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Le site des échanges avec la Chine

 

 

ACTUALITES DU MONDE CHINOIS 

par

Daniel Arthur Laprès

 

 

 
 

ACTUALITES DU 13.07.2007


 

* Le tai-chi-chuan, une assurance antistress (le Monde)

* La Chine dissimule ses morts par pollution (Libération)

* Un opposant à la stérilisation battu en prison (Libération)

* Le fisc chinois et les enfants interdits (le Monde)

*La Chine exécute l'ancien patron de la santé publique (le Figaro)

*Benoît XVI défend ses ouailles en Chine (Libération)

*Chine : 400 villes nouvelles à construire (les Echos)
 
 
 
 
 

*Le tai-chi-chuan, une assurance antistress (le Monde)
LE MONDE | 09.07.07 | 17h51  •  Mis à jour le 09.07.07 | 17h51

Malgré l'apparition d'activités concurrentes d'origine chinoise comme le qi gong (fondée sur le travail du souffle et de l'énergie), le tai-chi-chuan continue de s'imposer comme l'une des pratiques antistress les plus populaires. Gymnastique douce pour les uns, sport de combat pour les autres, cette discipline est, selon les estimations, pratiquée régulièrement par plus de 60 000 personnes en France.

Enseigné, y compris dans certaines maisons de retraite, le tai-chi est une discipline particulièrement abordable. Certains médecins le préconisent, entre autres, dans la rééducation des maladies cardio-vasculaires. "Le tai-chi-chuan, c'est aussi une philosophie du corps et de l'esprit ; on est tellement concentré qu'on se retrouve en harmonie avec soi-même", insiste James Kou, auteur de Taï chi chuan (Marabout, 2005).

A Paris, dans le parc des Buttes-Chaumont, une vingtaine de pratiquants se retrouvent très régulièrement chaque jour pour une séance en plein air. Parmi les habitués figure Ginette Cherel, 74 ans. Qu'il pleuve ou qu'il vente, elle assiste à tous les cours depuis deux ans. "Si je ne viens pas tous les jours, je ressens un manque. Le tai-chi me fait tellement de bien...", explique-t-elle.
Selon les associations où le tai-chi-chuan est enseigné, ce sport est présenté soit comme un exercice d'assouplissement et de relaxation, soit comme une forme de combat. Ses origines s'appuient sur la philosophie taoïste fondée sur le yin et le yang, la force et la faiblesse. La légende veut qu'un moine, nommé Chang San Feng, surprit un jour par la fenêtre un combat entre un oiseau et un serpent. La souplesse et l'ondulation du reptile opposées à la vitesse et à l'esquive de l'oiseau lui inspirèrent cet art martial. Mais les historiens s'accordent à dire que c'est un paysan, Yang Lu Chan, qui, à la fin du XVIIIe siècle, fonda sa propre école.

FORCE SPECTACULAIRE

Le tai-chi-chuan se pratique également avec des armes telles que le sabre, l'épée, la lance ou encore avec un éventail. L'objectif consiste à effectuer des mouvements ondulatoires très précis afin de libérer une force qui peut être spectaculaire. "Les gestes lents ne correspondent pas à une danse cosmique mais à des mouvements d'attaque et de défense", précise Anya Méot, professeur de tai-chi-chuan au sein de l'association Toum. Vêtus en habit traditionnel, tunique chinoise bleue et pantalon blanc ample, ses élèves sont de tous âges et de tous niveaux.

Anya Méot souhaite cependant mettre en garde contre certains clubs non affiliés à une fédération. "Ils inculquent parfois le tai-chi sans précautions, affirme-t-elle. Or si cette discipline n'est pas correctement enseignée, les élèves peuvent avoir de sérieux problèmes, notamment au dos."

Laurène Casseville

Article paru dans l'édition du 10.07.07.
 

* La Chine dissimule ses morts par pollution (Libération) Par Pascale Nivelle QUOTIDIEN : mercredi 4 juillet 2007

Une étude censurée de la Banque mondiale fait état de 750 000 décès potentiels.

La pollution aurait-elle causé 750 000 morts ? Ecrire cela dans un rapport officiel risquerait de provoquer «des émeutes», s'offusque Pékin, qui a demandé à la Banque mondiale, selon le quotidien britannique Financial Times (FT), de censurer son étude sur le coût humain de la pollution en Chine. Pourtant, la Chine, associée à ce rapport qui court depuis plusieurs années, ne dément pas le chiffre des «morts prématurées». En 2006, «année la plus noire pour l'environnement», elle a reconnu 161 incidents majeurs de pollution, et aussi que les objectifs fixés pour réduire les émissions de substances polluantes «n'avaient pas été atteints». Elle ne conteste pas non plus que 16 des 20 villes les plus polluées du monde se trouvent à l'intérieur de ses frontières, comme annoncé dans un précédent rapport de la Banque mondiale.

Caviardée.  La Chine, devenue le principal émetteur mondial de dioxyde de carbone, selon une déclaration du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, lundi, voudrait seulement que tout cela se sache le moins possible. Un an avant l'arrivée des 10 000 athlètes des Jeux olympiques, le ciel de la «société harmonieuse» doit rester le plus clair possible. Le mois de juin, avec 15 jours «médiocres en termes de qualité de l'air», a beau avoir été le pire jamais enregistré depuis 2000, les autorités continuent d'annoncer 245 jours de ciel bleu pour 2007.

C'est que la Sepa, l'agence nationale chinoise pour la protection de l'environnement, et le ministre de la Santé s'inquiètent de l'impact de nouvelles révélations sur la population, chauffée à blanc par les innombrables problèmes engendrés par la pollution, redoutant un accroissement des conflits sociaux déjà nombreux dans le pays. Toujours selon le FT, ils ont réclamé, et obtenu en fin d'année dernière, la suppression d'un tiers de l'avant-projet du rapport de la Banque mondiale, «trop sensible» et susceptible de «provoquer des troubles sociaux». Une carte détaillée des endroits les plus touchés par la mortalité due à la pollution aurait également été caviardée. Le rapport, pas encore publié, aurait cependant été exposé lors d'une conférence à Pékin en mars, alors même que le Premier ministre, Wen Jiabao, axait son discours d'ouverture de la session annuelle de l'Assemblée nationale populaire sur les problèmes environnementaux.

Interrogé par le FT, Guo Xiaomin, ancien membre de la Sepa chargé de coordonner l'équipe de recherche chinoise pour l'étude de la Banque mondiale, a justifié la censure en expliquant que «la méthodologie était peu fiable», et que les chiffres ne seraient «pas compris». Il a ajouté qu'il ne jugeait pas nécessaire d'alourdir un rapport déjà très épais.

Décès évitables.  Dans la partie manquante de l'avant-projet, les estimations font apparaître que la pollution de l'air des villes chinoises provoque la mort prématurée de 350 000 à 400 000 personnes chaque année. 300 000 autres mourraient en raison de la mauvaise qualité de l'air à l'intérieur des bâtiments, comprendre l'enceinte des ateliers et des usines. Dans les campagnes, la mauvaise qualité de l'eau entraînerait 60 000 décès évitables. Les officiels de la Sepa et du ministère de la Santé ont refusé de répondre aux questions du FT . Leur discours habituel, fondé mais pas franchement satisfaisant, est que les émissions chinoises sont dues principalement aux entreprises étrangères installées en nombre sur son territoire. La Banque mondiale a déclaré que les conclusions du rapport étaient encore à l'étude, et qu'elles seraient bientôt rendues publiques.
 

* Un opposant à la stérilisation battu en prison (Libération) par Pascale Nivelle, QUOTIDIEN : lundi 9 juillet 2007

La femme d'un célèbre dissident aveugle dénonce les violences qu'il a subies.

Sur son tee-shirt blanc, la photo d'un bel homme souriant derrière ses lunettes noires. Le portrait de son mari, l'avocat aveugle Chen Guangcheng, condamné en août à une peine de quatre ans et trois mois de prison pour avoir dénoncé la politique de stérilisation forcée dans sa province du Shandong, à l'est de la Chine.

«Complice».  Chen, 35 ans, officiellement emprisonné pour «troubles à l'ordre public», est l'icône de nombreuses associations de droits de l'homme. En atteste le courrier considérable que reçoit sa femme, Yuan Wei Jing, par l'intermédiaire de ses avocats pékinois. Les lettres, affranchies aux Etats-Unis, en France ou en Australie, s'empilent par centaines, illisibles pour cette jeune institutrice provinciale jusque-là coupée de tout contact avec l'Occident. Elle en fait des liasses, qu'elle range à côté de sa pile de tee-shirts. Assignée à résidence dans son village, cloîtrée dans son appartement avec les deux enfants, un garçon et une fille, qu'elle a eus avec Chen, en dépit de l'intraitable politique de l'enfant unique, elle continue de se battre comme elle peut.
Il y a quelques jours, la photo de son homme sur la poitrine et sa fille de deux ans sur le dos, elle a déjoué la surveillance de ses gardiens, postés en permanence au bas de son immeuble. Elle a escaladé trois murs et a pris un train pour la capitale, afin de voir les avocats de son mari. «Chen m'a dit de le faire. Il a peur qu'il m'arrive quelque chose. Je suis considérée comme sa complice.» La dernière fois qu'elle a pu le voir dans la prison de Linyi, Yuan l'a à peine reconnu : «Le 16 juin, les gardiens ont voulu lui raser le crâne, comme à tous les autres prisonniers. Il a refusé, disant qu'il était innocent et ne voulait pas être marqué par ce symbole. C'est là que les gardiens l'ont battu, à coups de pied et de poing. Puis ils se sont mis à 6 ou 7 pour terminer la séance de rasage. Je l'ai vu trois jours plus tard, il était encore gonflé et plein de bleus. Il ne voulait plus manger.»

Yuan s'est alors adressé aux dirigeants de la prison, qui ont refusé de lui montrer le dossier médical, prétextant que Chen avait déclenché l'incident et frappé d'autres détenus. «Il est aveugle, dit sa jeune femme, incapable de se déplacer tout seul.»
«Piège».  Ils se sont rencontrés en 2001, Chen, avocat autodidacte, débutait ses combats. Il a gagné un premier procès à Pékin, dénonçant l'interdiction pour les aveugles non résidents de la capitale de prendre le métro. Puis il a défendu les paysans de sa province, frappés de toutes les discriminations possibles. Au printemps 2005, lorsque les autorités de la province du Shandong ont lancé une campagne de stérilisation forcée pour répondre aux quotas de naissances exigées par Pékin, il s'est lancé dans la bataille, enquêtant, alertant les médias et les associations de droits de l'homme, saisissant les tribunaux. «Il savait ce qu'il risquait, dit sa femme, mais, dans notre ville, il y avait jusqu'à cent avortements par jour, il fallait faire vite pour arrêter ça.»
En août, il était placé en résidence surveillée. Au mois de mars suivant, sorti de chez lui pour défendre un de ses cousins qui se faisait tabasser par la police sous ses fenêtres, il a été arrêté. «C'était un piège», dit sa femme. Lors de son procès, en août 2006, des témoins ont été kidnappés, des avocats empêchés d'entrer dans le tribunal. La peine, qui se veut «exemplaire», a été confirmée en appel en novembre, lors d'un procès encore plus vite expédié que le précédent.

Depuis, ses avocats ont été tabassés par de mystérieux voyous, et les pétitions internationales contre l'emprisonnement poli-tique de Chen restent lettre morte. «L'enjeu est immense pour les autorités», dit Hu Jia, ami pékinois de Yuan et militant célèbre, «la politique de l'enfant unique fait des millions de mécontents en Chine. Si jamais ces gens-là commencent à se révolter, c'est la fin de l'harmonie sociale».
 
 

* Le fisc chinois et les enfants interdits (le Monde)
LE MONDE | 05.06.07 | 14h52  •  Mis à jour le 05.06.07 | 14h52
CANTON DE DUNGU (GUANGXI) ENVOYÉ SPÉCIAL

C'est une simple feuille. Une feuille qui tremble entre ses mains. Une feuille qui l'indigne. Ce commerçant relit pour la énième fois sa "facture" et redit son indignation : "Pourquoi devrais-je payer une somme pareille ? 6 000 yuans (581 euros) parce que j'ai eu quatre enfants ?" Dans le village de Dungu, entre rizières fluorescentes et reliefs tourmentés de montagnes en pain de sucre, la colère gronde contre les fonctionnaires du planning familial qui s'emploient, de force plutôt que de gré, à imposer un strict respect du contrôle des naissances.

"Pourquoi voulez-vous que je paye sur la foi de ce bout de papier sans tampons ? interroge le commerçant. Mon argent risque de filer directement dans la poche de l'agent du planning familial." Prudent, l'homme refuse de dire son nom. Sa "facture" lui ordonne de payer dans les deux jours une "taxe sociale de compensation" en application de la loi en vigueur depuis 1979 : un enfant seulement pour les Chinois des villes, deux pour les Chinois des champs, mais seulement si ces derniers ont connu la déveine d'avoir une fille. L'Etat laisse alors une seconde chance aux paysannes pour leur permettre d'enfanter un garçon.

Seules certaines minorités ethniques, comme les Tibétains, ne sont pas soumises à ces obligations. En une trentaine d'années, trois cents millions de naissances ont ainsi été évitées, selon les chiffres officiels. Les quatre rejetons du commerçant, âgés de 18, 16, 11 et 9 ans, ont failli lui coûter cher. Mais le jour où les agents sont revenus, il a convoqué des copains, quelques costauds, et les agents sont repartis penauds, sans rien pouvoir lui arracher. "Comment voulez-vous que je paie une somme pareille ?", lâche-t-il, assis derrière le comptoir de son épicerie de village en allumant une grosse pipe en bambou.

A Dungu, comme ailleurs dans plusieurs cantons de la province du Guangxi, la colère gronde si fort que, depuis une quinzaine de jours, des milliers de personnes se sont vengées contre les bâtiments officiels. Le 19 et le 20 mai, ici comme dans sept autres cantons du district de Bobaï, la foule a brûlé des voitures, donné l'assaut aux sièges des gouvernements municipaux ou aux bâtiments abritant les locaux du planning familial. Mardi 29 mai, deux villages d'un autre district, celui de Rongxian, ont connu des troubles et des batailles rangées avec la police. L'agence de presse Chine nouvelle a confirmé que des émeutes avaient bien eu lieu, un aveu assez rare. Une trentaine de personnes, de source officielle, auraient été arrêtées. Des rumeurs non confirmées ont fait état de plusieurs morts.

A l'entrée de Dungu, dans un autre quartier, un groupe de paysans prend le frais devant de petites maisons de pierre à l'approche de la nuit. Torse nu, un homme, qui préfère ne pas s'identifier comme le reste des villageois, est assis sur un minuscule tabouret. Il explique calmement les raisons de la colère : "Ce n'est pas tant le contrôle des naissances qui nous gêne que la façon dont il est appliqué. Rendez-vous compte : les types du planning familial débarquent chez les gens, vêtus de treillis militaires, casqués, armés de gourdins. Tous ceux qui refusent de payer les amendes voient leurs biens confisqués ! Les agents démontent les fenêtres, les portes, s'emparent des ustensiles de cuisine..."

MÉTHODES MUSCLÉES

Un vieillard au visage mangé d'énormes lunettes intervient, allongeant les bras : "Parfois, ils forcent les femmes qui n'ont pas la permission d'être enceinte à avorter !" En vertu de la loi, les grossesses des femmes sont en effet sévèrement réglementées.

Pourquoi une telle violence ? Parce qu'en janvier, le gouvernement central s'est ému de constater que les directives concernant le contrôle des naissances étaient de moins en moins respectées ; et que les fonctionnaires trafiquaient les quotas. Pékin a donc tancé les responsables provinciaux et édicté de nouvelles directives, remettant ainsi au goût du jour des pratiques que l'on pensait être en voie de disparition : à Bobaï, affirme un journal hongkongais critique de Pékin, Apple Daily, de nouvelles règles auraient été imposées aux agents du planning familial : d'ici au mois d'août, avance le quotidien, chacun d'entre eux doit prouver qu'il a contribué à la stérilisation d'un homme ou d'une femme et doit avoir collecté une amende d'au moins 50 euros ! Faute de quoi, les promotions sont supprimées.

Il y a quelques semaines, lors d'un colloque organisé à l'Université du peuple de Pékin, le chef du bureau national du planning familial, Zhang Weiqing, s'était inquiété des perspectives d'un nouveau "rebond" démographique. Parce qu'à la campagne, les paysannes continuent de se marier trop tôt et que, en ville, les riches sont prêts à payer des amendes coûteuses pour fonder une famille nombreuse.

Il n'en fallait sans doute pas plus pour que, dans des régions comme le Guangxi, une "région autonome" assez pauvre de 46 millions d'habitants, peuplée notamment de membres de l'ethnie Zhuang, les méthodes musclées des fonctionnaires provoquent des explosions de violence. "Nous sommes pour le planning familial !", clament en choeur les villageois. Mais tous ont trois, quatre, voire cinq enfants. Ici, les quotas ont été violés depuis belle lurette !

Ce qui s'est passé en mai dans la région est comme le précipité des menaces de désordres sociaux affectant la quatrième puissance économique mondiale : écart croissant de revenus entre les citadins et les paysans, corruption endémique des fonctionnaires provinciaux, rigidité des mentalités au pays du parti unique et attachement aux traditions dans le monde rural. La Chine des campagnes donne parfois l'impression d'être assise sur un volcan.

COLÈRE SOUS UN CIEL DE PLUIES

Dans la presse officielle, le chef du district de Bobaï, Huang Shaoming, a dû reconnaître, au lendemain des émeutes, que "la façon de travailler" des fonctionnaires locaux était peut-être en partie à la source "des problèmes"...
Le montant des "taxes sociales de compensation" semble en tout cas avoir été l'objet d'une ahurissante inflation dans des coins reculés où l'on a du mal à gagner 2 euros par jour : des articles dans la presse de Hongkong font état d'amendes variant entre 1 200 et 2 000 euros pour le premier enfant "de trop" ! Les sommes peuvent doubler pour le second, tripler pour le troisième.

A Dungu, notre commerçant confirme ces chiffres : "Ils nous demandent maintenant de payer les "arriérés" pour des enfants désormais adolescents : 2 000 yuans (194 euros) par année de retard pour chaque enfant." Sous les ciels de pluies du Guangxi, la colère n'est peut-être pas près de retomber.

Bruno PhilipArticle paru dans l'édition du 06.06.07.
 

* La Chine exécute l'ancien patron de la santé publique (le Figaro)
De notre correspondant à Pékin JEAN-JACQUES MÉVEL.
 Publié le 11 juillet 2007
Actualisé le 11 juillet 2007 : 08h21

L'État-parti veut frapper vite et fort pour calmer la tempête levée par des scandales de corruption à répétition.

L'AVALANCHE de scandales sanitaires qui déferle sur le « made in China » a fait une victime de plus hier : Zheng Xiaoyu, 63 ans, ancien patron de l'Agence chinoise de contrôle alimentaire et pharmaceutique, a été livré au bourreau dans la banlieue de Pékin. Il est devenu le premier dignitaire exécuté de l'ère Hu Jintao. La mise à mort de ce communiste grand teint, de ce ministre, ressemble à un coup de relations publiques. Elle vise sans doute à calmer la tempête déchaînée, dans le pays comme à l'étranger, par des révélations en série sur des aliments avariés et des médicaments frelatés. L'image de la Chine, le carnet de commande de ses puissants exportateurs et l'intérêt de ses clients étrangers en dépendent. L'État-parti a voulu frapper vite et fort.

 Procès à huis clos

Pourtant, les derniers scandales, tels le sirop pour la toux au glycol qui a tué des dizaines de Panaméens, les croquettes qui viennent de décimer les animaux de compagnie aux États-Unis ou encore les jouets au plomb expédiés en Occident avant Noël peuvent difficilement être imputés à un responsable démis il y a deux ans. L'exécution de Zheng risque plutôt de braquer le projecteur sur une inquiétante convergence chinoise : la vanité de la plupart des contrôles, la corruption qui gangrène les étages de la dictature et pour finir l'application expéditive de la peine de mort quand le reste a échoué.

Zheng Xiaoyu a été condamné à la peine capitale le 29 mai pour « corruption passive et négligences », au bout d'un procès tenu à huis clos. La justice lui reproche d'avoir touché 6,5 millions de yuans (700 000 euros) en échange de l'approbation de médicaments mal testés par les laboratoires chinois. L'un d'entre eux, un antibiotique, a causé la mort d'une dizaine de patients.

Zheng, mis à la retraite en 2005, a été arrêté l'an dernier. Il fut bientôt suivi derrière les barreaux par sa femme et par son fils. À l'énoncé de la sentence, Pékin avait fait savoir sans détour qu'un appel serait rejeté. La presse chinoise a signalé l'épuisement des recours juste avant l'annonce de l'exécution. L'agence officielle, Xinhua, n'a pas précisé si le supplicié a subi un tir dans la nuque ou une injection létale. L'application de la peine capitale à un homme du sérail et surtout la rapidité de la procédure laissent perplexes les juristes chinois.

La mauvaise presse suscitée à l'étranger par le déferlement des scandales sanitaires est accablante, à l'approche d'olympiades dont Pékin veut faire la vitrine éclatante de sa modernisation économique et technologique. Mais ce n'est peut-être qu'une partie de l'explication. Après un procès en catimini, l'élimination de l'accusé numéro un enterre le dossier au moment où des avocats plus courageux que les autres commençaient à faire circuler la liste, restée confidentielle, des groupes qui crachent au bassinet. En Chine, les corrompus paient rarement ; les corrupteurs plus exceptionnellement encore, surtout s'ils sont influents.

 Dérive mafieuse

 À cette urgence s'en ajoute une autre, plus politique. À l'approche d'un congrès décisif du PC, l'équipe Hu Jintao veut faire sentir qu'elle a la situation en main. Zheng a eu le tort d'incarner au mauvais moment la dérive mafieuse d'une bonne partie de l'appareil. Dans son cas comme dans beaucoup d'autres, les Chinois parlent de « parapluies noirs », responsables officiels qui monnaient au prix fort les passe-droits et les protections. Le dossier sanitaire n'est qu'un aspect du cancer. L'incapacité de la Chine à réduire ses émissions polluantes, ou encore la découverte récente de réseaux d'esclavage organisés, n'a pas d'autre explication : à Pékin et ailleurs, nombreux sont les commis de l'État qui ferment les yeux en se remplissant les poches.

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* Benoît XVI défend ses ouailles en Chine (Libération)
Pékin critique les accusations portées par le pape sur la liberté de culte. Par P.N. (avec AFP, Reuters)

QUOTIDIEN : lundi 2 juillet 2007

La Chine est un pays officiellement athée, et le Vatican n’a pas à s’immiscer dans ses affaires intérieures au nom de la religion, rappellent les autorités de Pékin à Benoît XVI. Dans une longue lettre envoyée samedi aux catholiques chinois, le pape a critiqué les restrictions exercées par le pouvoir chinois sur la liberté de culte, qui «étouffent l’activité pastorale»  et sèment la division parmi les fidèles, réclamant «une authentique liberté religieuse».

«Réaliste».  «S’il est prêt à améliorer les relations avec la Chine, le Vatican doit agir plutôt que de créer de nouveaux obstacles»,  a répliqué dans un communiqué très court le ministère des Affaires étrangères, rappelant son leitmotiv : «Le Vatican doit interrompre ses prétendues relations diplomatiques avec Taiwan et reconnaître que la République populaire de Chine est le seul gouvernement».  Une attitude «réaliste»,  selon Pékin. Benoît XVI, qui souhaite «une normalisation»,  a pourtant mis les formes, dans sa lettre publiée en mandarin sur le site du Vatican et surtout destinée aux 8 à 12 millions de pratiquants chinois : «Il est vrai que, ces dernières années, l’Eglise jouit en regard du passé d’une plus grande liberté», «le Saint-Siège demeure ouvert aux négociations qui sont nécessaires pour dépasser le difficile moment présent»,  ajoute-t-il, «mais on ne peut nier que demeurent de graves limitations qui touchent le cœur de la foi». «Je suis conscient que la normalisation demande du temps et qu’elle présuppose la bonne volonté des deux parties»,  dit aussi Benoît XVI, qui a raison sur ce point.

Durcissement. L’histoire est déjà longue entre les deux Etats. En 1951, le Vatican a reconnu Taiwan, où s’était enfui le nonce apostolique. Le gouvernement de Pékin, obsédé par le retour de l’île rebelle dans la «mère patrie»,  a alors obligé les -catholiques à couper tout lien avec le Saint-Siège, et a cessé ses relations diplomatiques. Depuis 1957, les fidèles ne sont autorisés à pratiquer qu’au sein de l’Association -catholique patriotique de Chine, entièrement contrôlée par l’Etat communiste. Persécutés -durant la Révolution culturelle, ils ont profité des -années 80 pour se réorganiser, certains dans le giron de l’Eglise -patriotique. Les autres, 30 à 40 % selon le -Vatican, ont créé des Eglises -clandestines, qui sont plus ou moins tolérées aujourd’hui en Chine.

Il y aurait 130 diocèses, 80 évêques officiels en Chine, dont 90 % sont reconnus par -Rome, selon les spécialistes. Le principal écueil, pour des -relations normalisées, reste la nomination des évêques, dont Pékin veut garder la prérogative. En 2006, l’ordination de trois évêques de l’Eglise -patriotique sans l’accord du Vatican a provoqué un durcissement très net. Après deux millénaires européens et américains fastes pour les catholiques, le pape espère que le troisième sera asiatique : « Une grande moisson de foi sera recueillie dans le vaste et vivant continent asiatique»,  écrit-il dans sa lettre aux Chinois. Cela ne semble pas entrer dans les projets immédiats de -Pékin.
http://www.liberation.fr/actualite/monde/264649.FR.php
© Libération
 
 

*Chine : 400 villes nouvelles à construire (les Echos)
14/06/07

Urbanistes français et chinois se penchent sur le développement des villes appelées à accueillir 300 millions de citadins à l'horizon 2020.

Alors qu'une exposition sur l'architecture chinoise se prépare à Chaillot à la Cité de l'architecture et du patrimoine, plusieurs urbanistes et architectes français ont rencontré début juin à Pékin leurs homologues chinois pour renforcer une collaboration amorcée depuis des années et pour confronter leurs expériences. Une exposition, « La Ville projetée », présentée au musée de l'urbanisme de la capitale chinoise a retenu 56 projets illustrant la production urbaine et architecturale française. Autour de cette manifestation, un colloque, le deuxième du genre (« Les Echos » du 19 avril 2005), sur le thème « Penser la ville de demain », organisé par l'Afex (Architectes français à l'export) et Ubifrance, avec les représentants économiques et culturels de l'ambassade de France à Pékin, s'est tenu le 7 juinà l'occasion de la clôture du festival Croisements, dans le prolongement des « années croisées » France-Chine.

L'urbanisation des villes chinoises s'accélère. L'enjeu est de taille : aujourd'hui, la moitié des activités à l'export des architectes de l'Hexagone se déploie dans l'empire du Milieu. Une cinquantaine d'agences françaises y ont des projets. Les dernières statistiques fin 2005 recensaient 4,3 milliards de mètres carrés en chantier dans les 31 régions de ce pays 20 fois plus grand que la France, notamment aux abords des grandes concentrations urbaines. Déjà 15 villes chinoises abritent plus de 4 millions d'habitants, près de 500 villes en accueillent plus de 500.000 et, pour tenter de maîtriser un étalement anarchique, 400 villes nouvelles s'édifient dans les périphéries des mégapoles. Curieuses de connaître le processus de création des villes nouvelles françaises, les autorités chinoises s'intéressent à la politique volontariste appliquée notamment en région parisienne dans les années 1960.

Conscientes des dangers de la précipitation inhérente à l'obligation d'agir dès à présent pour accueillir les 300 millions d'habitants - 12 millions par an - qui frappent aux portes des villes, elles tentent de s'imprégner des expériences étrangères pour en éviter les erreurs. Ce scénario de 60 % de citadins d'ici à 2020 accélère le rythme de la construction, en particulier à Pékin à 420 jours de l'ouverture des jeux Olympiques, événement majeur pour l'urbanisme et l'architecture, et démonstration du prestige international de la Chine. Les grues s'affairent sans relâche.

A voir aujourd'hui la carcasse de l'arche monumentale des futures tours de la télévision CCTV, dessinée par l'architecte hollandais Rem Koolhaas, personne ne peut croire que ses 700.000 m2 seront livrés à l'été 2008 ni que ses 35.000 employés disposeront des transports publics pour s'y acheminer. Longtemps arrêté, le chantier de l'Opéra de Pékin, conçu par Paul Andreu, touche à sa fin et les fauteuils des trois salles de concert attendent l'inauguration officielle, fixée à janvier prochain. Les travaux de l'ambassade de France d'Alain Sarfati devraient démarrer début 2008.

La résille d'acier du stade olympique, oeuvre des architectes suisses Herzog et de Meuron, impose sa silhouette à l'entrée du parc olympique, à trois kilomètres au nord de la Cité interdite, près d'un lac en forme de dragon et face au cocon lumineux et translucide de la piscine.

Le site reste fermé au public « pour ménager l'effet de surprise », explique Shao Weiping, architecte général du BIAD (Beijing Institute for Architectural Design), qui, lors d'une tableronde animée, a défini les grandes lignes de l'aménagement de ce véritable « challenge sportif » avec ses équipements et ses espaces de déambulation hiérarchisés. Tous les bâtiments consacrent le mariage de la tradition et de la culture de Pékin avec la modernité que reflète le recours à des matériaux contemporains et des concepts techniques sophistiqués. Après avoir lancé une consultation internationale pour le schéma directeur de ce parc, les autorités ont préféré retenir des équipes locales, publiques et privées.

Différence d'échelle

Inspirés pendant des décennies par le modèle soviétique de fabrication des villes qui juxtaposait des éléments sans souci de les relier, les Chinois veulent renouer avec leurs traditions et faire éclore leur architecture propre. Ce pays, qui, selon la Banque mondiale accueillerait d'ores et déjà la moitié de l'activité de construction dans le monde, est confronté à tous les problèmes en même temps - procédures, formation des hommes, choix et mise en oeuvre des matériaux -, et se montre sensible à une approche plus fine de composition urbaine. Il a fait appel depuis plus d'une décennie à de nombreux architectes français pour réaliser non pas des tours mais des projets « emblématiques », tels l'Opéra de Pékin, le Centre des arts orientaux et l'aéroport de Shanghai (Paul Andreu) ; l'Opéra de Shanghai, l'aménagement de la rue de Nankin et l'avenue du Siècle à Pudong, appelée les Champs-Elysées de Shanghai (Arte Charpentier) ; le musée de la capitale et la gare de Xi Zhi Men à Pékin (Arep) ou l'Ecole nationale d'administration publique, l'ENA chinoise, à Pudong (Anthony Béchu)...

Encouragés à maîtriser l'extension de leurs mégacités, les urbanistes chinois souhaitent recoudre les quartiers et redécouvrent la nécessité de sauvegarder leur patrimoine. Ils sont certes capables, pour l'avoir toujours fait, de démolir pour reconstruire à l'identique des rues entières, mais préfèrent instaurer la protection de certains secteurs, rompant ainsi avec une pratique aveugle de démolition - « du passé, faisons table rase ». Plusieurs acteurs français sont consultés pour réhabiliter des pans entiers de villes. Entre autres, l'agence Arte Charpentier à Zheng Zhou participe à la greffe de 2,5 millions d'habitants sur une ville qui en compte 2 millions. Anthony Béchu redessine les portes et les douves du coeur historique de la ville de Pingyao et Architecture Studio s'attelle au projet de développement de Chongqing qui, situé à l'intérieur des terres, compte déjà 12 millions d'habitants, en absorbe 200.000 nouveaux chaque année, et pourrait rapidement devenir la plus grande métropole du pays, devant Shanghai (près de 20 millions) et Pékin (15 millions).

Les Chinois requièrent désormais l'installation des architectes français dans leur pays pour mener efficacement leurs travaux, avec cette préoccupation, récente : trouver des solutions innovantes pour économiser l'énergie à l'heure où deux tiers de leur consommation sont liés aux transport et à la construction. Les nouveaux bâtiments devront permettre l'économie de 50 % d'énergie par rapport aux standards actuels. Une première expérience de quartier « environnemental » fut conduite dans la ville nouvelle de Wan Li, où 30 % d'espaces verts ont été aménagés - 50 % sont exigés aujourd'hui dans les nouvelles urbanisations en France. Elle a obtenu le Grand Prix de l'urbanisme en 2000 à Shanghai.

Dans l'une des villes les plus polluées du monde, les 24es Olympiades sont aussi placées sous le signe du respect de l'environnement et se veulent les « Jeux verts ». Ces mêmes JO ont accéléré le recours à l'acier dans la construction. « Presque inconnu en 1980, l'usage de ce matériau connaît un développement rapide, déclare John Fu, d'ArcelorMittal : en 2004, le volume d'acier dans la construction a porté sur 14 millions de tonnes, représentant 5 % de la production totale d'acier en Chine, et on prévoit de monter à 10 % en 2010 avec 45 millions de tonnes. » Autre nouveauté : l'apparition d'une nouvelle génération d'architectes chinois autorisés à monter des agences privées aux côtés des instituts d'urbanisme de l'Etat et des collectivités locales.

L'exposition « La Ville projetée » poursuivra son itinérance en juillet à Shenyang, dans la Chine du Nord, aux portes de la Corée. « Elle sera présentée au public chinois dans la Cité interdite », annonce Madeleine Houbart, secrétaire générale de l'Afex et commissaire de l'exposition, pour qui « la ville durable est une ville désirable ».
 
 
 


 
 
 

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